Au Puits du vieux Hibou, après le combat contre Hamun Kost

Valim (03/12/2020)

Valim partît sur un coup de tête, sans même vraiment y prendre conscience. En un clin d’œil il avait ajusté ses vêtements, repositionné son sac et son arbalète et descendu avec agilité le mur de la tour. Ses réflexes de voleur étaient toujours là. Ce n'est que sur le chemin qui l'éloignait du repère des orcs qu'il réalisa ce qu'il venait de faire. Il abandonnait le groupe. Non... abandonner était un peu fort, au fond ce n'est pas comme s'ils avaient vraiment besoin de lui et qu'ils se retrouvaient désemparés sans sa présence. Tout au plus aurait-il pu leur faire des adieux en bonne et due forme, mais après tout, ce n'était pas dans ses habitudes. C'est surtout pour Teadon qu'il regrettait son départ furtif. Après tout, il avait toujours été respectueux et sincèrement attaché à sa cause. Et malgré leurs différences, ils s'étaient bien entendus et presque habitués l'un à l'autre. Mais Valim était sûr que Teadon comprendrait. Et après tout, leurs chemins se recroiseraient sûrement d'ici quelques temps.

C'est donc perdu dans ses pensées qu'il poursuivit son chemin, ne sortant de ses réflexions que pour réaliser qu'il n'avait finalement pas mangé et que son ventre le lui reprochait bruyamment. Mais il avait l'habitude de faire disette... Non vraiment la tournure que prenaient les choses n'étaient pas pour lui. Ce n'était pas un guerrier, ni un négociant. En quelques jours il avait failli mourir plus de fois que dans toute sa courte vie. Et même s'il aimait l'aventure et le danger, cela avait consisté jusque-là essentiellement à tenter de voler le plus gros joyau du bourgmestre local avec comme risque de passer quelques jours au fond d'une geôle. C'est sur le souvenir ému de quelques-unes de ses meilleures opérations qu'il trouva un coin abrité pour passer la nuit et qu'il s'assoupit jusqu'au lendemain.

Après un réveil tranquille et la recherche de quelque nourriture Valim se remit en route. Mais son trajet fût quelque peu écourté par la rencontre inattendue d’un énorme Gobelours tenant trois loups au bout d’une chaîne. Il quitta prestement le sentier et alla se cacher en haut d'un arbre à quelques mètres de là. Il put alors observer que le Gobelours portait à son côté une épée au fourreau, et celle-ci lui sembla d’une bien trop belle facture pour ce type de créature. Mais il n’eut guère le temps d’observer davantage, car les loups l’avaient flairé, et il dut user de toute sa discrétion et agilité pour les tenir éloignés. Il sauta de branche en branche, manqua de dégringoler, se rattrapa sur ses pattes de justesse, courut plus vite que jamais à travers bois et cours d’eau, pour finalement réussir à les semer, sans doute plus par décision du Gobelours que par fatigue des loups.
Il n’était pas passer loin (une fois de plus!) d’y laisser sa peau. En s’effondrant contre un arbre, trempé de sueur et exténué, Valim remercia son maître pour l'apprentissage auquel il l'avait soumis et qui, si dur lui avait-il paru, lui avait permis aujourd'hui encore d'avoir la vie sauve. Il réalisa également à quel point la route en solitaire serait plus dangereuse qu’en groupe, quand bien même cela impliquait des combats plutôt que la fuite. Il frissonna en imaginant ce que les loups auraient fait de lui s’ils l’avaient attrapé, et se mit à regretter de ne pas avoir son compagnon à ses côtés, ne serait-ce que pour lui raconter la frayeur qu’il venait d’avoir. C’est à ce moment-là, adossé à cet arbre, qu’il décida de faire demi-tour et de rejoindre le groupe, en espérant les retrouver, à Haute-Bannière ou même au Puits, s’il n’était pas trop tard.

Après s’être remis de sa course folle, il retourna au cours d’eau pour remplir sa gourde, réajusta ses affaires, et pris le chemin en sens inverse. Il se remémora à nouveau son apprentissage et ce qui était arrivé à son vénéré maître. Il se rappela également le procès et le rôle qu'y avait joué Teadon. Et à quel point la solitude nouvellement retrouvée le renvoyait à ce souvenir douloureux. Il réalisa qu'il avait toujours été accompagné de Teadon depuis lors et se rendit compte à quel point sa fuite avait été irréfléchie et fût d'autant plus en accord avec sa décision de rejoindre le groupe.

Lorsque Valim arriva au Puits, il découvrit ses compagnons après la bataille. C'est du moins ce qu'il lui sembla en observant les lieux et en voyant le piteux état de chacun.

Novembre (03/12/2020)

Le soleil réchauffait doucement les aventuriers sur la butte. Le cadavre du mage dément gisait dans son sang, percé de flèches, le crâne fracassé. Une fois la tour et la tente fouillées, chacun reprit son souffle. Kruk pansa ses blessures, une nouvelle fois : ces terres étaient plutôt dures au demi-ogre, qui en avait cependant vu d’autres.

Pensive, elle observa Sildar avec intérêt. Et une certaine admiration. Sa nature calme et volontaire, son engagement au service de la communauté interrogeaient la demi-elfe et faisaient écho aux préceptes qui guidaient aussi son clan, sa famille. Ses yeux tombèrent ensuite sur l’elfe. Son port altier, sa prestance naturelle, son urbanité assumée. Novembre n’arrivait pas encore à le cerner : prompt à vouloir éviter le mage fou ou les fers rouges, mais pourtant prêt à tenter l’aventure. Teadon savait-il lui-même ce qu’il voulait ?

Étrangement, elle regrettait le Félys. Mais alors qu’elle commençait à se remémorer leur rencontre abrupte, suivie d’une collaboration intuitive et habile, un sourire se dessina sur son visage. Au pied de la butte, éclairée par la lumière rasante du soleil déclinant, une silhouette féline se découpait. Valim était revenu.