Durant l'exploration des entrailles du Puits du vieux Hibou

MD (06/12/2020)

Une pluie régulière tambourinait sur la toile. En dessous, assis sur une pierre plate que Kost avait probablement déplacée pour le même usage, Sildar Hallhiver se tenait immobile, le buste penché en avant. Il scrutait la margelle à travers les pans entrouverts de la tente. Une certaine inquiétude se lisait dans le plissement de son front. Autour du puits comme au-delà, rien ne bougeait. Un oiseau dans les feuillages fit une nouvelle fois entendre son cri.
D’un soudain claquement, l’Humain ferma le livre posé sur ses genoux et se leva. La tente ne lui permettait pas de se redresser complètement. Le dos voûté, il fit jouer ses muscles raidis par le froid et l’attente, puis déposa précautionneusement son manuscrit sur la pierre sèche. Enfin, il releva le col de sa pelisse et, sans se soucier davantage de l’averse, se dirigea à grands pas vers le puits où ses compagnons étaient descendus.
Les bottes plantées dans la boue, les cheveux ruisselants, Sildar était penché au-dessus de l’orifice. Il avait posé ses mains gantées sur la margelle, mais ne discernait rien dans l’obscurité du conduit. Il prit une inspiration pour lancer un appel, mais finalement se ravisa. Combien de temps leur faudrait-il encore ? Dodelinant de la tête, il regagna la tente en enjambant les flaques.

MD (08/12/2020)

Le sac de jute plaqué contre la bouche, le Nain se laissa aller à jurer.
Par Jeweln, un vrai fiasco !
Le coup violent qu’il reçut dans les côtes lui fit cracher le peu d’air qui filtrait péniblement à travers la toile épaisse. Il mit plusieurs minutes à calmer sa respiration. La douleur refluait. Mieux valait rester silencieux.
A quoi bon ? Par pur instinct de conservation ? Car sa mort n’allait évidemment plus tarder. Quelle ironie de finir ainsi, alors que la fortune et la renommée étaient à porter de leurs mains ! Ça lui paraissait dater d’une autre époque, mais c’était il y a seulement cinq ou six jours ; peut-être davantage finalement, il avait perdu la notion du temps. Comment avaient-ils pu en arriver là ? En quelques minutes, tout avait basculé : le raz-de-marée de ces Peaux-Vertes grouillantes avec leurs loups, la mort de Sildar sous ses yeux et la carte dérobée. Le reste s’était déroulé comme dans un lent cauchemar. Ligoté, séquestré dans le trou puant de ces créatures des jours durant, il s’était astreint à avaler l’infâme nourriture qu’on lui jetait.
Lorsqu’on l’avait à nouveau traîné par la barbe, tiré, poussé jusqu’à l’entrée du tunnel, il s’était repris à espérer. Allait-on le libérer ? Tharden et Nundro l’avaient-ils retrouvé ? Faux espoir, évidemment : il n’y avait personne d’autre que ces infectes créatures et leur colosse de chef s’approchant de lui. On lui avait enfilé ce sac sur la tête et il s’était senti arraché du sol. Encore le hurlement des loups, le tintement des chaînes, et le mastodonte l’avait balancé sur ses épaules, comme un vulgaire sac de guano. Le trajet avait été interminable. Meurtri à chaque enjambée, plusieurs fois jeté au sol sans ménagement au milieu des loups grondant, il s’était à de multiples reprises évanoui, de peur ou de fatigue.
Il était à présent roulé sur le côté, les pieds et les mains toujours liés. Il tâta comme il put le sol froid, fait de dalles banales. Toujours aveuglé par le sac, des bruits assourdis lui parvenaient désormais. Il ignorait encore tout de l’endroit où il se trouvait et la raison pour laquelle on l’y avait amené. Finalement, peut-être n’était-ce pas la fin ? Il fallait encore garder espoir.